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28 novembre 2012 3 28 /11 /novembre /2012 12:32
« Refuser l’opposition entre salariés »

Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, est de passage à Marseille. Son analyse sur l’activité gouvernementale et sur les modalités d’action.

Secrétaire général de la CGT depuis 1999, Bernard Thibault va quitter son poste au prochain congrès.


Quelle analyse faites-vous des premiers mois de la présidence Hollande ?
Il y a eu plusieurs étapes. Tout d’abord ce qui s’est fait dans le prolongement de la campagne électorale avec des décisions concrètes comme de remettre à 60 ans l’âge du départ à la retraite pour les salariés ayant commencé à travailler jeunes, d’augmenter l’allocation rentrée scolaire ou avec le discours prometteur tenu à l’occasion de la conférence sociale.
Mais à partir de là, le patronat et singulièrement le Medef reprend ses esprits et part à l’offensive. A la rentrée, pour éviter un divorce, on a vu le gouvernement se présenter en force à l’université du Medef. Depuis, le lobby patronal n’a cessé de marquer des points. Cela se voit dans la ratification du traité budgétaire européen malgré les critiques émises durant la campagne,dans la priorité donnée à la baisse du déficit budgétaire, dans l’annonce d’un nouveau paquet d’aides aux entreprises au nom de la compétitivité...


Comment abordez-vous les nombreuses négociations actuellement en cours ?

Toujours en instaurant un rapport de force. Mais les négociations actuelles sont soumises à un véritable chantage à l’emploi. Pour exemple celles sur les retraites complémentaires. Si l’on focalise souvent sur la réforme du régime de base, les montants des complémentaires peuvent aller de 30 à 60% du montant final. C’est donc considérable. Or, le Medef soutient que les recettes étant insuffisantes, la seule solution est dans les économies, chiffrées à 6 milliards d’euros. Ils veulent faire payer les effets de leur politique aux retraités.
Autre exemple : la sécurisation de l’emploi. Parisot martèle que la seule option possible est la flexibilité. Ce qui n’est d’ailleurs pas une caractéristique franco-française. On le retrouve partout : il faut accepter les efforts où l’on menace de fermer les sites. En fait, on veut nous faire négocier avec le revolver sur la tempe. Ce que nous envisageons de dénoncer avec une initiative prévue mi-décembre.


Comment se décline l’action syndicale face à un gouvernement de gauche ?
Il y a nos actions dans beaucoup d’entreprises du secteur industriel où l’on se bat au quotidien. Dans les Bouches-du-Rhône, singulièrement, mais aussi ailleurs. Sans ces actions, la courbe des fermetures de site aurait été plus importante. Mais il y a aussi les manifestations. La première initiative, nous l’avons prise seuls : le 9 octobre en mobilisant autour de l’emploi industriel. Cela a été un succès et a contribué à imposer le sujet dans le débat public et politique. Le 14 novembre, journée de mobilisation européenne, a été un événement : on passait d’une phase où les syndicats se battaient seuls dans leur coin, à une initiative commune quel que soit le degré d’austérité pratiqué au niveau national.


Comment se passent les actions à l’échelle européenne qui semblent désormais incontournables?

Il y a tout d’abord l’action au sein des grands groupes qui ont souvent une assise européenne. Un contact régulier entre les délégués syndicaux qui permet de mieux résister à la volonté d’installer une opposition systématique entre les salariés que l’on retrouve aussi bien chez les patrons que chez les élus. Ce qui est à contre-courant des messages officiels de l’Europe que l’on présente souvent sous la forme valorisante de l’espace commun, du vivre ensemble. Mais dans les pratiques, on est dans la guerre économique.
La démarche syndicale est de montrer que l’avenir ne peut pas se concevoir en taillant des croupières aux voisins. A l’inverse, le recul d’un pays est toujours précurseur d’une situation similaire pour les autres. Et l’on a des exemples concrets. Ce n’est pas en France que l’âge du départ à la retraite a été en premier revu à la baisse car il y a ici une tradition d’opposition. Cela a été d’abord imposer dans les pays où le mouvement syndical est plus faible. Une fois adopté ailleurs, c’est devenu un argument pour l’imposer à la France. Autre exemple, nous avons repoussé le CPE, mais un contrat au rabais spécifique aux jeunes a été adopté dans d’autres pays, comme la Grèce, pour sortir de la crise… Nous avons donc besoin de cette coordination pour percevoir les offensives qui sont toujours destinées à être généralisées et promouvoir un autre modèle, celui de contrat social pour l’Europe. D’autant que ce n’est qu’ainsi que l’on pourra répondre à la montée en puissance inquiétante des forces politiques communautaristes et xénophobes et au fait que l’Europe est de plus en plus rejetée.


Après les turbulences liées à votre succession, où en est la centrale ?
Après quelques mois d’hésitations, le nouveau secrétaire général, Thierry Lepaon, a été désigné via un vote massif et il n’y a plus d’ambiguïté. Nous travaillons désormais à la préparation du congrès en réfléchissant notamment à la manière de renforcer nos implantations syndicales. En France comme ailleurs, la précarité ne s’accompagne pas d’un réflexe d’organisation collective. Or, la défense individuelle a ses limites et est illusoire. Nous devons donc trouver les outils pour permettre aux salariés de se défendre collectivement.

Entretien réalisé par Angélique SchallerSource lamarseillaise.fr

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