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27 janvier 2012 5 27 /01 /janvier /2012 18:30
«Les comités d'entreprises doivent se conformer à leur mission»

Alors que la gestion des comités de la RATP ou de SeaFrance a fait scandale, le député (NC) Nicolas Perruchot a fait adopter, ce jeudi, une loi renforçant l'encadrement des comptes de ces instances.

Quel est le contenu de cette loi ?

Cette loi comporte deux mesures. L'une impose aux comités d'entreprise de faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes indépendant et de les faire publier, au-delà d'un seuil qui sera fixé par décret. L'autre encadre plus strictement la politique d'achat des comités d'entreprises, car un certain nombre de dérives ont été constatées en la matière. Je prônais l'obligation de procéder à des appels d'offres, mais on m'a opposé un certain nombres d'arguments juridiques. Je considère néanmoins qu'il ne s'agit-là que d'une première étape, et que l'on pourra aller plus loin à l'avenir.

A quel type de dérives s'oppose le texte ?

Les plus gros comités d'entreprise gèrent des dizaines, voire des centaines de millions d'euros de budget. Pourtant, certains se retrouvent en cessation de paiement – comme celui d'Air France – ou avec des pertes abyssalles. L'expert comptable pourra orienter les choix de gestion, et prendre des mesures pour redresser les comptes.

Il s'agit également de s'assurer que les comités d'entreprise se conforment à leur mission, ce que la loi réaffirme. Certains comités ont financé l'opération «Un bateau pour Gaza», ou des campagnes publicitaires à connotations politiques. Ces initiatives débordent complètement du rôle de ces instances, censées animer l'action sociale et culturelle de l'entreprise.

Enfin, sur la politique d'achat, on a vu beaucoup de choses étranges : à la RATP, par exemple, des gobelets en plastique à 20 euros la pièce. Le contrôle du commissaire aux comptes permettra de mieux repérer ces anomalies.

Parle-t-on d'erreurs de gestion, ou de véritables malversations ?

Dans le cadre d'Air France, il s'agit de mauvaise gestion. On a cherché à faire rentrer beaucoup de gens à l'intérieur du comité, peut-être par copinage, avec pour résultat d'énormes déficits. Pour la RATP, on parle là de dérapages financiers graves, de fuites de fonds. Même s'il n'est pas encore possible de parler d'enrichissement personnel, ou de financement d'un syndicat quelconque.

Vous dites que le problème se présente surtout dans les grandes entreprises publiques, ou anciennement publiques. Pourquoi ?

Parce que c'est sur celles-là que nous avons des informations. Et parce que c'est là que les comités d'entreprise gèrent les plus gros budgets.

Le patronat ne fait-il pas preuve de négligence par rapport à ces dérives ?

On n'en parle pas assez, mais il est vrai que le président d'entreprise est, de droit, le président du comité. Est-ce que, par cette négligence, il s'agit d'acheter la paix sociale ? Souvent, c'est le DRH ou un cadre qui est délégué au comité, avec peu d'intérêt pour ce qu'il s'y passe. Alors que le rôle de cette institution est important : les activités sociales et culturelles peuvent représenter l'équivalent d'un 13e ou un 14e mois pour les salariés.

Restez-vous amer après l'enterrement de votre rapport sur le financement des syndicats, en décembre dernier ?

Oui, cela continue à m'indigner. J'ai tenté d'ouvrir des portes, mais je me les suis prises sur les doigts. Je vais d'ailleurs interpeller par courrier les candidats à la presidentielle à ce propos. L'étonnant, c'est de croire qu'on allait réussir à étouffer le sujet de cette manière. Au contraire, cette chape de plomb n'a réussi qu'à le faire rebondir plus haut, grâce aux médias. Peut-être y a-t-il matière à réflexion sur le fonctionnement des commissions d'enquêtes. Beaucoup d'autres sujets «tabous» pourraient connaître le même sort que mon rapport.

Depuis, l'actualité vous a bien servi, du scandale de la RATP à celui du comité d'entreprise de Sea France...

C'est sûr, sans compter l'annonce des non-représentations de Bernard Thibault et Jean-François Chérèque à la tête de la CGT et de la CFDT. Ou la rupture entre ce dernier syndicat et sa branche Sea France, ainsi que la réforme de la représentativité qui va modifier le paysage syndical. Le démocratie sociale est en train de bouger.

Quelles autres mesures contenues dans votre rapport avez-vous dû renoncer à intégrer dans votre loi ?

Mon rapport contenait 29 propositions, mais j'ai craint que l'Assemblée ne dispose pas d'assez de temps pour les examiner chacune. Je me suis donc concentré sur les deux sujets sur lesquels un consensus assez large pouvait se dessiner. Beaucoup de questions restent devant nous, notamment la gestion de la médecine du travail par le patronat, ou la formation professionnelle : dans ce domaine, si on rapporte les moyens mis, la gestion et les résultats obtenus, il y a manifestement un problème.

Le climat était-il aussi tendu autour de ce projet de loi qu'autour de votre rapport ?

La différence avec cette loi, c'est qu'il fallait aller vite – ce que les partenaires sociaux ont d'ailleurs dénoncé. Tout le monde s'est exprimé dans les trois tables rondes qui se sont tenues en 15 jours, et tous étaient d'accord pour plus de transparence dans les grands comités d'entreprise. Ils auraient préfére passer par la négociation sociale plutôt que par la loi. Mais les partenaires sociaux, qui se rencontrent souvent, n'ont jamais jugé utile de se réveiller sur le sujet. Ils le font maintenant, mais un peu tard...

La «chasse aux profiteurs» est un thème récurrent de l'UMP. Avez-vous été sollicité pour le développer pendant la campagne ?

Au contraire, l'UMP était presque indifférent à mon enquête sur le financement syndical, avant de décider d'enterrer mon rapport. J'ai ensuite été reçu par Nicolas Sarkozy, qui a dit regretter la façon dont cela s'est passé.

Source liberation.fr

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