L'avenir du pays apparaît de plus en plus incertain, mais ses créanciers refusent d'envisager un défaut de paiement. Et exhortent Athènes à poursuivre la réforme radicale de son économie.
Le ministre des Finances grec Evangélos Vénizélos le 19 septembre 2011 à un colloque économique près d'Athènes
Dans sa course contre la montre pour éviter la faillite, la Grèce va devoir allonger la foulée. Aujourd'hui encore, les créanciers du pays — FMI et Europe en tête — ont pressé Athènes de ne rien lâcher sur son plan de rigueur, voire de le renforcer. Et ce alors qu'une tranche d'aide européenne vitale pour le pays est toujours suspendue à l'approbation des parlements nationaux de l'UE, alimentant les pires scénarios quant à la solvabilité grecque.
Ce lundi, près d'Athènes, un sommet entre représentants du gouvernement et du FMI a abouti à un sombre diagnostic sur la situation du pays. Le représentant du Fonds Monétaire en Grèce, Bob Traa, a pronostiqué une croissance négative pour 2012, et la reprise en 2013 seulement. Dans ce contexte, selon le FMI, seules des «mesures supplémentaires» permettront au pays de résorber son énorme déficit, et notamment une réforme de l'administration fiscale pour augmenter ses recettes. Selon le plan de route du gouvernement Papandréou, le déficit doit passer de 24 milliards d'euros en 2009 à 1,8 milliards en 2011, avant d'atteindre l'excédent budgétaire l'année suivante.
En réponse, le ministre des Finances grec a annoncé de prochaines «décisions de caractère historique». Jugeant que la semaine à venir sera «très difficile pour le pays, pour la zone euro», ainsi que pour lui «personnellement», Evangélos Vénizélos a déclaré qu'il y avait du «personnel en excédent» dans le secteur public. A ses côtés, le ministre du Développement Michalis Chryssohoïdes a annoncé «un plan ambitieux visant à lever les entraves pour les entrepreneurs», afin de «passer d'une économie d'Etat et d'importations à une économie de compétitivité». D'après les médias grecs, le montant total de ce nouvel effort pourrait se monter à 4 milliards d'euros pour 2011 et 2012.
La Commission Européenne a elle aussi augmenté la pression sur la Grèce. A la différence du FMI, elle n'a pas réclamé d'efforts supplémentaires, mais attend «le plein respect des objectifs [déjà] fixés», alors que le pays a pris du retard sur ceux-ci. Lundi après-midi, une téléconférence devait permettre à la troïka FMI-BCE-Commission européenne de s'assurer de la bonne volonté grecque. Seul un avis positif permettrait le déblocage de la prochaine tranche d'aide européenne, de 8 milliards d'euros. Encore faudra-t-il que les Etats membres, qui ont affiché leur division à ce sujet le week-end dernier, achèvent d'accorder leurs violons.
Ces atermoiements ont donné plus de poids à l'hypothèse d'un défaut grec. Pour un certain nombre d'observateurs, la barre de la dette est désormais trop haute pour le pays. Dimanche soir, Dominique Strauss-Kahn a renfilé un instant son costume de directeur du FMI, pour encourager les créanciers de la Grèce, «Etats et banques» à «prendre leur perte». C'est-à-dire rayer la dette du pays? «C'est un peu l'idée», a lâché DSK. Et la chute des bourses, ce lundi, témoigne du peu de confiance des marchés dans la solidité de la zone euro.
Mais la perspective d'une restructuration ne trouve guère de soutien parmi les décideurs publics. Ce lundi, François Fillon a qualifié d'"irresponsable" la proposition de DSK. De son côté, le ministre des Finances François Baroin a fermement répété qu'un défaut n'était «pas une hypothèse de travail»: «la Grèce sait ce qu'elle a à faire, le gouvernement grec sait quelles sont ses obligations, ses devoirs, ses responsabilités vis-à-vis de ses créanciers.»
Même son de cloche du côté de la BCE, où l'on exhorte Athènes à compter sur ses propres forces, plutôt que sur la mansuétudes des prêteurs. La Grèce ne peut désormais qu'attendre la mi-octobre, et le résultat des délibérations européennes sur la prochaine tranche d'aide. Sauf accident.
Source liberation.fr