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28 octobre 2012 7 28 /10 /octobre /2012 08:30

La convergence des luttes avance, malgré les bureaucraties !

 

de : Luis
samedi 27 octobre 2012

Meeting du NPA à Paris le 25/10/12

Intervention d’un camarade de L’Etincelle de chez PSA

Camarades,

Voilà maintenant un an et demi que la mobilisation a commencé à l’usine PSA-Citroën d’Aulnay-sous-Bois, où je milite syndicalement dans la CGT mais aussi politiquement dans la Fraction L’Etincelle. Et pourtant cette mobilisation est loin d’être achevée, loin aussi d’être complète et réussie. Le CCE de ce matin et la tripartite de cet après-midi ne sont certainement pas la dernière étape des négociations entre le patron, le gouvernement et les syndicats, ni surtout la dernière étape de notre lutte qui nous oppose à Peugeot pour empêcher la fermeture de l’usine d’Aulnay et le licenciement de milliers d’autres travailleurs de PSA. Loin de là.

Citroën est peut-être le cas le plus médiatisé, mais notre lutte rencontre les mêmes difficultés et les mêmes obstacles que les centaines d’entreprises menacées aujourd’hui de fermeture ou de licenciements. A PSA, nous semblons avoir plus d’atouts que d’autres pour nous en sortir. L’usine d’Aulnay concentre encore près de 3 000 travailleurs, sous-traitants compris. Elle appartient à un des grands groupes de l’automobile qui, malgré ses appels au secours, est assis sur un solide matelas financier. De plus, Peugeot bénéficie de l’appui de l’Etat qui vient de promettre encore une garantie de 7 milliards d’euros pour la banque de la firme. Ces 7 milliards, rapportés aux 8 000 d’entre nous menacés de perdre leur emploi, cela fait près de 900 000 euros par tête, en moyenne 40 années de salaire d’un camarade sur chaîne. Mais Montebourg, qu’il soit en marinière ou en costard, ne songe même pas exiger de Peugeot, qu’il conserve tous ses salariés quelques années de plus, en vraie contrepartie.

Nous ne faisons donc pas exception. Comme l’ensemble de la classe ouvrière nous sommes sous le feu de la même offensive capitaliste pour augmenter les profits et réduire ce qu’ils appellent le « coût du travail » : fermer les entreprises ici, imposer leurs contrats productivité-emploi ailleurs, licencier dans cette boîte, réduire les salaires, augmenter les horaires, la flexibilité et la mobilité dans une autre. Oui, nous sommes tous dans la même galère de Citroën à Electrolux, de Ford à Technicolor, de Sanofi à Petroplus, pour ne citer que les boîtes les plus importantes. Pour sortir de cette galère, il nous faudrait une perspective commune, l’espoir qu’une lutte nous réunissant tous est possible, une lutte qui serait alors irrésistible par son ampleur. Mais pour l’instant, il faut le constater, nous avons chacun ramé de notre côté. A Citroën comme ailleurs.

Quand la CGT de PSA, il y a un an et demi, a révélé le plan de la direction qui prévoyait la fermeture de l’usine en 2014, elle a rencontré le scepticisme de beaucoup de travailleurs. Un scepticisme favorisé par la propagande de Peugeot qui voulait garder son projet secret jusqu’aux élections présidentielles et qui en a nié l’existence pendant près d’un an. Ce scepticisme n’a pas empêché une minorité de réagir dès juin 2011. A l’initiative de la CGT (ou comme tout le monde le sait, les militants de LO sont influents), il y a eu des dizaines d’actions de protestation, de débrayages, de rassemblements, de manifestations dans l’usine ou au siège. Nous étions alors le plus souvent quelques centaines de travailleurs à nous mobiliser, avec l’approbation des copains de boulot, mais pas accompagnés par le plus grand nombre.

Cet été la direction a finalement admis qu’elle mentait depuis un an. Cela a suscité un coup de colère qui a dépassé un moment la minorité. La production a été stoppée quelques jours. Les manifestations ont redoublé. Un Comité de préparation de la lutte, composé des délégués, de syndiqués et de non syndiqués a vu le jour. Mais faute d’autre perspective, beaucoup se sont raccrochés aux nouvelles promesses de la direction, même s’ils n’y croyaient pas vraiment. Car PSA, passe sans honte d’un mensonge à un autre. Il prétend maintenant trouver une solution pour les 8 000 travailleurs dont il compte se débarrasser. C’est une énorme blague évidemment. Par exemple, l’une des solutions envisagées serait la mutation des travailleurs d’Aulnay sur d’autres sites PSA. Or sur celui de Poissy, précisément, la direction vient d’annoncer la suppression prochaine de certaines équipes et de dizaines de postes de travail. Philippe Varin, notre PDG, prétend pourtant y muter pas moins de 1 500 ouvriers d’Aulnay. Comme Varin ne nous a jamais dit qu’il était adepte de la répartition du travail entre tous et qu’il avait adhéré au NPA, il est évident qu’une mutation à Poissy ou ailleurs ne sera que le sas vers une sortie définitive, le temps de régler le sort d’Aulnay, puis de Rennes, puis d’autres encore.

Depuis la rentrée l’atmosphère à l’usine s’est parfois tendue. La direction, ouvertement soutenue par le gouvernement, durcit son attitude jusqu’à la provocation. Par exemple, elle prend prétexte du moindre incident dans l’usine pour déposer plainte contre des travailleurs qui manifestent. Avant-hier encore, nous avons accompagné au commissariat du coin un camarade accusé d’avoir prétendument proféré des menaces de mort contre un contremaître. Il y a les provocations de la direction, mais aussi la complicité gouvernementale, comme à l’occasion de notre manifestation au Salon de l’auto. Le 9 octobre, nous y sommes venus à 510. Nous avions rempli 10 cars. De retour à l’usine, les gars étaient contents d’avoir rencontré des délégations de nombreuses autres entreprises, de l’auto, des sous-traitants, mais aussi d’autres secteurs, comme des postiers ou des cheminots. Par contre, ils étaient ulcérés de s’être vu interdire l’entrée du Salon par des centaines de gendarmes mobiles. Sans parler des tirs de lacrymos ! Autre exemple : lorsque les chaînes sont arrêtées sur ordre de la direction, ce qui arrive quotidiennement, et que nous en profitons pour discuter de la situation, elle nous compte gréviste et nous retire l’heure ou la demi-heure sur notre fiche de paie. D’où la semaine dernière un nouveau coup de colère, avec débrayages et cortèges de salariés parcourant l’usine pendant deux jours. Il y a eu des arrêts ou de grosses perturbations de la production, et même ce que certains ont appelé la « séquestration » du directeur de l’usine puis d’un chef parmi les plus détestés. « Séquestration » est d’ailleurs une appellation tout à fait abusive. Au plus, c’était quelques heures de cohabitation pacifique, dans une même pièce avec un certain nombre de leurs salariés qui en ont profité pour dire ce qu’ils avaient sur le cœur.

Une minorité, mais de plusieurs centaines de travailleurs tout de même, pas du tout négligeable, est donc toujours aussi réactive et déterminée. Elle est de plus en plus lucide aussi sur la situation dans la boîte comme sur le rôle du gouvernement. A Citroën, aujourd’hui, il est fréquent d’entendre des travailleurs dire qu’on ne les reprendra pas à voter socialiste ou Hollande. Pourtant la majorité demeure attentiste, sceptique et hésitante. De toute évidence elle n’a guère confiance en sa propre force, en sa capacité de faire reculer la direction, d’imposer ses revendications, d’empêcher la fermeture de la boîte ou d’obtenir des revendications spécifiques comme des reclassements durables ou des primes de départ conséquentes pour ceux qui de toute manière n’envisagent pas de faire de vieux os à Citroën. Le nombre de ceux qui participent aux actions, comme celui des présents aux assemblées générales hebdomadaires peut varier un peu, mais ne grossit pas vraiment.

Il manque une perspective. Et on ne voit pas comment elle pourrait être donnée sans dépasser le cadre de Citroën seul. Elle ne pourra l’être que si nous nous tournons vers l’extérieur, si nous trouvons le moyen d’ajouter nos forces à celles de tous ceux qui aujourd’hui font face aux mêmes problèmes et aux mêmes ennemis ; de toutes ces boîtes qui ferment, licencient, ou toutes ces entreprises du secteur privé comme public où les conditions de vie et de travail empirent.

Cette convergence des luttes, nous sommes un certain nombre à Aulnay à y penser, à en parler, à la proposer et même, dès que l’occasion se présente, à tenter d’établir les contacts avec d’autres entreprises. Ce n’est pas facile. Il faut vaincre les préjugés qui empêchent de voir plus loin que le bout de son usine. Il faut se heurter aussi parfois à l’hostilité de ceux dont le rôle devrait être justement de tisser les liens et d’organiser les liaisons d’une boîte à une autre, d’un secteur à un autre, les dirigeants syndicaux.

Ainsi quand le 15 septembre nous nous sommes rendus à un rassemblement des travailleurs de PSA Rennes, menacés comme nous de perdre 1 400 emplois, c’est le dirigeant de la CGT Rennes qui a tenté de nous empêcher de prendre la parole et de nous adresser à nos camarades bretons. Notons toutefois que l’accueil des ouvriers de Rennes, par contre, a été enthousiaste à l’égard de la trentaine que nous étions à venir les soutenir. Comme quoi, dès que des contacts se concrétisent, les mentalités changent vite. Plus surprenant peut-être encore pour mes camarades de l’usine d’Aulnay, lorsque, 15 jours plus tard, une cinquantaine de travailleurs de Ford Bordeaux, dont Philippe Poutou, sont montés à un rassemblement de travailleurs du 93 à la cité des 3000 : la centaine d’ouvriers de Citroën présents étaient drôlement contents de les voir arriver. Mais ce sont les bureaucrates départementaux, pour une fois tous unis, de Sud à la CGT, appuyés de plus par un dirigeant CGT de Citroën lui-même, qui leur ont refusé la possibilité de prendre le micro pour s’adresser à nous. Heureusement, dans l’usine, de telles attitudes ont provoqué pas mal d’émotion, d’incompréhension et même de colère. Le surlendemain, des dizaines de travailleurs ont demandé des comptes aux dirigeants syndicaux. Ce n’est pas tout. Ils ont commencé à élire des ouvriers dans quelques secteurs pour un comité de base avec la volonté de contrôler les décisions prises en leur nom par les syndicats. Ils ont même convoqué les syndicats pour demander des comptes. Je peux vous dire que les représentants syndicaux qui sont venus faisaient plutôt profil bas. Ils ont aussi demandé à participer à toutes les négociations avec la direction. Et j’en passe. Et je peux vous dire que désormais, à l’usine, la tonalité des assemblées générales a changé. Comme la tonalité des discussions dans les ateliers. On ne se contente plus d’écouter deux ou trois dirigeants. Cela discute, cela interpelle, chacun donne son avis. Comme quoi, en dépit des hésitations, tout peut rebondir, et bien des initiatives peuvent être prises.

Pour en revenir au contexte actuel, où les licenciements et les fermetures de boîtes se multiplient, où le nombre des chômeurs augmente d’un millier par jour, le tous ensemble est plus que jamais à l’ordre du jour. La convergence des luttes est bien la perspective.

Certes c’est à nous, ceux qui à Citroën sont conscients de cette nécessité, de nous organiser pour concrétiser cette orientation, de faire appel et d’aller à la rencontre des autres travailleurs, de mettre sur pied des visites aux autres boîtes. A une petite minorité, c’est ce que nous avons commencé à faire.

Ce matin encore, pendant que 300 camarades manifestaient devant le siège de PSA pour faire pression sur la direction et l’empêcher d’arracher aux délégués syndicaux centraux un avis favorable à des mutations immédiates, j’étais moi-même avec 60 de mes camarades à Faurecia, dans l’Oise, une usine de 1000 salariés, sous-traitante de l’automobile. Je peux vous assurer que l’accueil que nous avons reçu en particulier des ouvrières qui ont arrêté le travail et ont repris derrière nous les slogans, « PSA-Faurecia même combat » et « grève, grève », suffit à montrer que la convergence des luttes n’est pas une lubie de gauchistes. Elle est à portée de la classe ouvrière si nous savons la mettre en branle et militer au sein des entreprises et pas seulement des milieux syndicaux. Le comité de base va devoir se renforcer, avec le soutien des dirigeants syndicaux si ils marchent, et sans eux quand ils tournent le dos aux intérêts de notre classe.

Mais les convergences exigent d’être plusieurs. Et si, à Citroën, nous sommes quelques-uns à bien savoir que personne ne remplacera notre propre activité en direction des autres boîtes, soyez aussi conscients de l’inverse : il est important pour les travailleurs de Citroën de savoir que d’autres ont la volonté de se joindre à eux. Nous l’avons constaté à chacun de nos rassemblements où sont venus des travailleurs d’autres boîtes ; à chaque fois que des délégations d’autres usines sont venues se joindre à nous et nous contacter. Ces premiers contacts concrets non seulement redonnent le moral et renforcent la combativité, mais surtout crédibilisent la possibilité de faire converger nos mobilisations. C’est donc aussi ce que vous, qui êtes dans cette salle, devez tenter d’impulser dans vos propres entreprises, dans vos propres secteurs d’intervention.

A nous de faire grossir la boule de neige qui entraînera l’avalanche sociale. C’est ensemble que nous pouvons le faire.

Source bellaciao.org

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