Le blog de Cyril LAZARO

Polémique après le suicide d’un salarié d’Eurodisney

Un cuisinier de 30 ans avait porté plainte pour harcèlement moral contre ses supérieurs en juin. Il s’est suicidé dimanche à la gare d’Esbly.

Sa vie était devenue un cauchemar. Embauché en 2004 par Eurodisney, Rabii Hourourou, cuisinier au restaurant Blue Lagoon, à Disneyland Paris, s’est suicidé à la gare d’Esbly dimanche, dix jours après son retour au travail dans un restaurant du parc d’attractions. En arrêt maladie depuis huit mois pour « état dépressif à la suite d’un problème au travail (harcèlement) »*, ce Marocain de 30 ans était toujours sous traitement lourd — un cocktail d’anxiolytiques et d’antidépresseurs — quand il a repris son poste à mi-temps thérapeutique voilà quelques jours.

Dimanche, après être rentré de son travail, Rabii Hourourou est ressorti de chez lui, à Esbly, pour se rendre à la gare SNCF voisine. Déterminé, il a attendu qu’un train arrive pour poser sa tête sur un rail.

Reste à cerner les raisons exactes de son geste. Au parquet de Meaux, on évoque des problèmes conjugaux. « Il n’y a rien de tout ça. C’est faux. C’est n’importe quoi », assurait hier soir sa veuve, jointe par téléphone. Plusieurs collègues ayant travaillé avec le défunt n’hésitent pas à pointer du doigt un supérieur du jeune homme qui l’aurait « cassé » lors d’une évaluation. Toujours est-il que Rabii Hourourou, qui attendait en vain depuis deux ans d’être promu chef de partie (NDLR : l’équivalent d’agent de maîtrise), ne supportait plus de travailler dans l’entreprise. En dépression lourde, il a même dû être hospitalisé en psychiatrie à Lagny-sur-Marne.

Après avoir demandé à la CFDT de négocier son licenciement, il s’est finalement rapproché du syndicat Force ouvrière et a déposé une plainte aux prud’hommes pour harcèlement moral. Le 15 juin dernier, l’employé a également déposé plainte pour le même motif au commissariat de police de Meaux contre deux de ses supérieurs.

Dans quelle mesure ces démêlés avec sa hiérarchie ont-ils pesé sur son acte? Difficile à dire. Touhami Hadi, du syndicat indépendant du personnel (SIP), avait à l’époque géré son dossier pour la CFDT. Il évoque une « fragilité aux causes multiples, personnelles et professionnelles. » « C’est vrai qu’il était amer, qu’il trouvait que les choses n’étaient pas allées assez vite pour lui », confie ce dernier. En revanche, FO Disney, qui avait repris le dossier, n’y va pas par quatre chemins. Sur son blog, le syndicat accuse ouvertement le directeur de la restauration du parc de « faute inexcusable et de non-assistance à personne en danger »…

« Il s’est senti manipulé, trahi », confie pour sa part un collègue, qui a préféré garder l’anonymat. Comme d’autres personnes ayant travaillé avec le disparu, cet employé à Disneyland Paris ne comprend pas qu’« on ait laissé Rabii reprendre un poste stressant », alors qu’il était encore sous traitement. Un avis du reste partagé par Touhami Hadi, pour qui « Rabii n’aurait pas dû reprendre le travail ».

Contactée, la direction n’a pas souhaité commenter officiellement le drame. Tout en rappelant son attention particulière aux conditions de travail de ses 14500 salariés.

*Selon la mention manuscrite du médecin sur l’arrêt de travail du salarié du 6 mars 2009.

Source leparisien.fr

Un erratum s'est glissé dans l'article du parisien. Veuillez trouvez ci-joint le communiqué.
Contrairement à ce que nous avions écrit dans l'article paru mercredi intitulé "Polémique autour du suicide d'un salarié de Disneyland", Rabii Hourourou, qui s'est donné la mort voilà quatre jours à Esbly, avait d'abord été défendu par Touhami Hadi pour la CFTC et non la CFDT. Son dossier avait été ensuite été repris en main par Force Ouvrière. La CFTC avait proposé de négocier 800 euros d'indemnités de départ, l'avocat de FO avait entamé une procédure aux prud'hommes pour harcèlement moral.

Révolution au comité d’entreprise de Disney

Un comité d’entreprise remplacé par... cinq comités distincts.Une annonce du géant des loisirs, qui intervient après une année marquée par des malversations financières.

Faut-il y voir l’effet du scandale financier qui a entaché son actuelle direction l’an passé? Toujours est-il que le comité d’entreprise (CE) d’Euro Disney devrait être entièrement réorganisé cette année. Après une première réunion de travail le 5 février, le CE doit se repencher aujourd’hui sur le « projet de modification des pratiques sociales » porté par la direction du géant des loisirs, qui emploie 13000 salariés.  

Concocté par le directeur des ressources humaines de Disneyland, ce projet prévoit l’éclatement de l’actuel CE en cinq comités d’établissement distincts, sous la houlette d’un comité central d’entreprise (CCE) réduit à la portion congrue. 

Un fonctionnement plus efficace. C’est l’argument principal de cette réorganisation. Les dossiers qui ne concernent pas toute l’entreprise seront traités au niveau des conseils d’établissement. Ce qui devrait remédier à l’encombrement actuel de l’agenda du CE : 31 réunions programmées en 2009, 22 l’année précédente… sans compter les assemblées extraordinaires. Pour Djamila Ouaz, représentante CFDT au CE, cette réforme devrait contribuer également à « mieux responsabiliser les chefs d’établissement ». « Aujourd’hui, on nous renvoie à la direction centrale dès qu’il y a un problème quelque part. Avec cette réorganisation, les négociations se feront au plus près du terrain… » 

Les syndicats craignent des inégalités. Les négociations risquent pourtant d’être serrées sur le découpage. L’actuel projet de la direction se compose de cinq comités d’établissement : les hôtels associés au Disney Village regrouperont 3119 salariés, les parcs, 6534 salariés, les services de maintenance et de support aux opérations, 1375 salariés ; sans oublier l’administration (1854 salariés) et un ensemble produits-optimisation (700 salariés). « Un découpage disproportionné, selon Djamila Ouaz. Le résultat, c’est qu’on aura, dans la même entreprise, des établissements de riches, qui brasseront de gros budgets, et des établissements de pauvres, qui ne pourront pas offrir les mêmes avantages à leurs salariés. » Un constat partagé par le syndicat minoritaire FO. Trois nouvelles réunions sont prévues avant avril pour évoquer le découpage avec les partenaires sociaux. 

Un timing très serré. Soutenue depuis plusieurs années par l’inspection du travail, la refonte du CE vient d’être lancée en début d’année au pas de charge par le directeur des ressources humaines. Il va devoir faire vite pour obtenir un accord avant les prochaines élections des représentants du personnel à la fin de l’année. Guy-Bruno M’Boé, du syndicat Force ouvrière, suppose que ce calendrier pourrait même être accéléré. « Ils vont signer fin juin, et les élections seront organisées dans la foulée dès début septembre », assure le représentant FO. Et pour cause : selon lui, « une avancée rapide de ce dossier permettra au DRH, mis en difficulté par le scandale des malversations au CE, de sauver sa tête dans l’entreprise ».
Aurélien Pérol Source leparisien.fr

Romain Bourg, le mercredi 10 février 2010